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Sur la poursuite du nucléaire : Macron dans la « capitale verte »

Ce tract a été rédigé dans le cadre de l’inauguration de Grenoble « capitale verte » par Macron, qui, contrairement à ce qui était prévu, et officiellement pour des raisons sanitaires, ne viendra pas. L’inauguration se fera quand même en visioconférence. Dénoncer cette inauguration, c’est, entre autres, un prétexte pour parler du nucléaire et de l’annonce faite par Macron en novembre dernier de construire de nouveaux réacteurs en France. Ce tract sera distribué dans les rues de Grenoble vendredi après-midi et lors de la manifestation organisée contre le label Grenoble capitale verte, le samedi 15 janvier 2022. C’est également l’occasion de réaffirmer la nécessité des luttes antinucléaires à destination des milieux écolos anticapitalistes (et consorts).

A bas l’Etat et sa société nucléaire !

Version courte (2 pages) – Version longue (8 pages) page par page / brochure

Sur la poursuite du nucléaire et son esbroufe

Visite (virtuelle) de Macron dans la « capitale verte »

Macron sera à Grenoble, en visioconférence, le 15 janvier à l’occasion d’une cérémonie d’ouverture pour le lancement du label de «  Capitale Verte européenne 2022  » décerné à la ville de Grenoble. Concrètement, la Commission européenne donnera 350 000 euros et la France 4 millions d’euros à la ville, pour organiser des centaines d’événements autour de «  la transition écologique, de la culture et des sciences ». Le but est clairement économique : « Grenoble devrait bénéficier des mêmes effets à long terme que les précédentes villes lauréates : création d’emplois, revalorisation de l’image de la ville, impact touristique ».

Encore un spectacle pseudo-écologique qui ne cache pas très bien ses intentions.

> Grenoble ville « verte » ?

On n’est pas dupes sur ce que fait la politique « écolo » de Piolle à Grenoble [1], et on sait pertinemment que ce prix va dans le sens d’un développement économique et touristique qui nous répugne. Investir des millions d’euros pour de l’événementiel et des spectacles en lui donnant un joli prix de « capitale verte », ça s’appelle du greenwashing.

On est en droit de se demander de quelle écologie on parle : sous prétexte d’optimisation (énergétique et humaine), ici, comme dans de nombreuses métropoles, les ingénieurs font le choix des objets connectés et de la ville greentech du futur. En fait, ils œuvrent au développement d’une société algorithmique toujours plus numérisée dont la mise en place s’est accélérée avec la crise du corona virus, notamment grâce à internet (via la fibre et les réseaux 3, 4, 5G) et ses data center, toujours plus nombreux. Les data center mobilisent aujourd’hui près de 7 % de la production énergétique mondiale et leurs besoins énergivores ne cessent d’augmenter.

Sous couvert de nous faire consommer des gadgets high tech [2] (voitures, montres et smartphones connectées, domotique, véhicules autonomes, réalités virtuelle et augmentée..), la numérisation renforce les logiques de centralisation et de concentration du pouvoir (compteurs Linky, puces RFID, cartes d’identité biométriques, pass sanitaire), et aggrave l’exploitation au travail (télé-travail, plateformes de livraison Uber Eats et Deliveroo, pointage en QRcode des aides à domicile). Grâce à tous ces outils issus des bio et nanotechnologies, la Smart City rêvée par nos dirigeants pourra organiser la gestion optimale de tous les flux possibles et imaginables dans un monde où l’aléa sera devenu une inconnue intolérable. Ce n’est qu’un nouveau visage de la société technocratique qui renforce les outils de surveillance de masse (reconnaissance faciale, fichage des opposantEs politiques), et entretient les oppressions systémiques telles que le racisme ou le sexisme via les algorithmes.

En parallèle des objets numériques, la greentech, promue par le capitalisme vert, c’est aussi le passage des véhicules à carburant aux véhicules électriques. En vérité, sans remise en question de l’usage du véhicule individuel et de la société qui en a besoin (salariat, société de consommation, individualisme libéral), la mise en place d’un parc de voitures électriques va in fine renforcer les inégalités de classes sociales en Occident, tout en poursuivant l’exploitation des travailleur·euses minier·es dans les pays du Sud (dont les pays « décolonisés »), en puisant les métaux et terres rares pour les batteries de voitures. Enfin, ces véhicules électriques contribuent à la pollution atmosphérique depuis l’extraction des métaux, à la production, jusqu’à la mise en déchets non-recyclables des batteries : on est bien loin de la communication capitaliste sur ces véhicules « propres ».

Cette voie, toute tracée par l’État et le Capital, semble être celle de la société du futur, mais est-ce vraiment de cela dont on rêve ?

> Hypocrisie de Macron de venir célébrer un événement écolo en étant pro-nucléaire

Au premier trimestre 2022, Macron va développer son programme « France 2030 » dont voici l’introduction :
«  France 2030 répond aux grands défis de notre temps, en particulier la transition écologique, à travers un plan d’investissement massif pour faire émerger les futurs champions technologiques de demain et accompagner les transitions de nos secteurs d’excellence : énergie, automobile, aéronautique ou encore espace. »
Le ton est donné. Présenté en octobre dernier, ce plan nauséabond emprunt d’impérialisme sournois et d’un techno-solutionnisme décomplexé (création de « biomédicaments », production de mini-lanceurs réutilisables et de micro et mini-satellites, accroissement du parc de voitures électriques,..) fait la part belle à l’expansion énergétique (« gigafactories d’électrolyseurs » destinées à la production d’hydrogène, création de nouveaux réacteurs nucléaires dits « innovants »,..).

Parmi tous ces objectifs, la création de nouvelles centrales se place en tête de liste. Macron nous parle donc de renouveler le parc nucléaire alors que les quatre réacteurs les plus puissants, également les derniers à avoir été mis en fonctionnement (entre 1996 et 1999) : Civaux (Vienne) et Chooz (Ardennes) sont désormais hors service après la découverte de défaillances sur des pièces essentielles en cas d’accident. Concernant les EPR [3], le prototype de Flamanville (15 ans de chantier et toujours pas en fonctionnement, à cause d’ « anomalies de fabrication ») subit de nouveau un coup d’arrêt après qu’un « incident » à l’EPR1 de Taishan en Chine (fuites radioactives dans le circuit primaire du réacteur dont la cause probable serait un défaut de conception de la cuve de la filière EPR) remette de nouveau en question la fiabilité et la pertinence de ces infrastructures colossales au coût exorbitant.

Malgré ses allures d’inédit, cette annonce de « relance » du nucléaire, comme repris par les médias, n’est qu’une poursuite de la filière, car le nucléaire ne s’est jamais arrêté, comme le prouve l’exemple de l’EPR de Flamanville, en construction depuis 2007. Cette continuité ne semble être pour le gouvernement qu’une simple formalité tant ses plans sont déjà bien avancés : en novembre 2020 un rapport prévoyant le financement par l’État de la moitié des 47,2 milliards d’euros que devaient coûter ces nouveaux équipements est rendu public. Un mois plus tard, ce sont les sites convoités par EDF qui étaient dévoilés : Penly (Seine-Maritime), Gravelines (Hauts-de-France), et Bugey (Ain) ou Tricastin (Drôme). Enfin, en janvier 2021, on apprenait qu’EDF avait déjà commandé des pièces forgées en vue de la construction de ces nouveaux EPR.

Dans son annonce, Macron évoque la production de SMR (small modular reactors) [4], soit-disant des technologies « de rupture », beaucoup « plus sûres ». Mais qu’est ce que ça veut dire au juste ? Les SMR, ou mini-centrales, sont, à en croire nos dirigeants, l’avenir du nucléaire civil. Ils sont dotés d’une technologie similaire à celle des EPR (technologie à eau pressurisée), tout droit inspirée du secteur militaire (sous-marin). Des réacteurs vendus par paires, plus petits et moins puissants (et produisant, par conséquent, moins d’énergie) : on se demande bien ce que ça a de révolutionnaire. Une énergie plus chère ? Une multiplication des infrastructures pour compenser leur plus faible puissance ? Heureusement, on peut compter sur l’honnêteté d’EDF pour dévoiler ses véritables intentions : exporter, à terme, les mini-centrales à l’étranger, et principalement à destination de pays ne possédant pas « encore » d’infrastructures nucléaires. Sous la rhétorique sécuritaire (souveraineté énergétique, infrastructures soit disant plus fiables) se cache donc une réalité principalement économique et expansionniste, entreprise menée par l’État nucléocrate conjointement avec des industriels de l’armement.

> Avides de thunes, les nucléocrates mettent la pression à la Commission européenne

Le parc nucléaire mondial compte 444 réacteurs « opérationnels » répartis entre 32 pays. La France est le deuxième pays producteur d’énergie nucléaire au monde, après les États-Unis, ce qui lui permet d’exporter une partie de sa production. À l’heure où certains pays européens officialisent leur désengagement vis à vis du nucléaire civil (comme la Belgique ou la Suisse), d’autres signent des tribunes vantant les mérites de cette énergie qui, selon eux, contribuerait «  de manière décisive à l’indépendance de nos sources de production d’énergie et d’électricité  ». Ces dix pays (France, Roumanie, République Tchèque, Finlande, Slovaquie, Croatie, Slovénie, Bulgarie, Pologne et Hongrie) [5] – France en tête (avec ses 56 réacteurs contre 23 pour tous les autres cumulés) – s’offrent à une opération de lobbying intensif avec pour objectif, pas même dissimulé, de convaincre la Commission européenne de classer comme « absolument indispensable  » l’énergie nucléaire, et que celle-ci soit « incluse dans le cadre de la taxonomie européenne avant la fin de cette année » (c’est-à-dire dans la liste des énergies considérées comme « vertueuses » à la fois pour le climat et l’environnement que la Commission doit proposer dans les prochains mois). Bien entendu, si ces pays tiennent tant à cette classification, c’est que contrairement à ce qu’il pourrait sembler, ce n’est pas vraiment une médaille en chocolat. En effet, « cette classification permet une réduction des coûts de financement, cruciale pour les projets concernés et les États voulant les soutenir  », les financements massifs d’énergies « vertes » étant évalués à plusieurs dizaines de milliards d’euros.

Il y a quelques jours, la Commission européenne a, dans un projet de labellisation « verte », donné raison aux 10 États plaidants, facilitant du même coup le financement de nouvelles infrastructures. Cependant, cette décision ne fait pas l’unanimité, notamment auprès des pays ne possédant pas de centrales nucléaires comme l’Autriche ou ceux ayant décidé plus récemment de « renoncer » à la production d’énergie nucléaire comme l’Allemagne (bien que celle-ci continue à produire des infrastructures et de collaborer avec des pays comme la France) au profit d’un objectif full « renouvelable ».

On a bien compris, en Europe il y a ceux qui sont pour et ceux qui sont contre, mais il y a également ceux qui se rétractent et dont le cœur semble balancer de l’un à l’autre, comme l’Espagne, qui rallonge encore et toujours la durée de vie de ses réacteurs dans l’espoir de voir apparaître des technologies qualifiées de « plus fiables ». Autre cas, celui de l’Italie, sortie du nucléaire civil dans les années 1990, et dont le ministre de la Transition écologique a récemment dit : « Des pays sont en train d’investir sur cette technologie. Elle n’est pas encore mature, mais elle le sera bientôt. Si, à un certain moment, on est assuré que les déchets radioactifs seront peu nombreux, la sécurité élevée et les coûts bas, ce serait une folie de ne pas l’envisager ».

> En quoi c’est complètement débile de poursuivre le nucléaire

Aujourd’hui, les nucléocrates souhaitent poursuivre la construction de centrales nucléaires alors qu’ils ne savent toujours pas quoi faire des déchets produits. En effet, on peut rappeler le projet de CIGEO à Bure, toujours pas validé, d’enfouissement des déchets radioactifs. Ce projet, très contesté, prévoit d’enfouir environ 10 000 m³ de déchets hautement radioactifs et 75 000 m³ de déchets moyennement radioactifs (totalité dont la moitié n’a pas encore été produite) dans des galeries à 500 mètres sous terre dont la superficie serait équivalente à un métro parisien et demi. Le processus de réversibilité n’a pas été autorisé par les nucléocrates : en cas d’incendie, de fuite voire d’une meilleure solution de stockage ; il ne sera pas possible de ressortir les déchets (exemple de Stocamine en 2002 : une poubelle de déchets toxiques : amiante, arsenic, mercure,.. en Alsace, qui prit feu en souterrain pendant près de 2 mois, et pour lequel il fut décidé de laisser les déchets sous terre, après avoir éteint l’incendie). De plus, les déchets de CIGEO seront radio-actifs encore près de 100 000 ans, risquant fortement de polluer les nappes phréatiques, les champs, les forêts et environs [6]. Et hop ! Les magiciens cachent le problème sous le tapis, et ils osent appeler ça « la solution » aux déchets d’une industrie qu’ils veulent coûte que coûte poursuivre !

Aujourd’hui, les déchets nucléaires sont stockés en surface près des centrales ainsi qu’à la Hague, après qu’ils aient été retraités afin d’en extraire le plutonium pour, entre autres, permettre la confection d’armement nucléaire. Or, ces dernières décennies, une partie d’entre eux ont été jetés dans l’océan Atlantique ou encore envoyés en Afrique, et ont même eu pour projet d’être expédiés dans le Soleil. Encore dernièrement en 2021, des déchets nucléaires français ont rejoint la Sibérie pour y être « valorisés » [7]

Les nucléocrates n’ont pas non plus la solution pour démanteler les centrales arrêtées. C’est par exemple le cas de la centrale de Brennilis, en Bretagne, première mise hors service en 1985 ; de Superphénix sur le site de Creys-Malville, arrêtée en 1996 ; ainsi que les deux réacteurs de Fessenheim mis à l’arrêt en 2020 après 42 années d’activité. Et ce sera également le cas des réacteurs : Blayais 1-2, Bugey 2-3, Chinon BA-B2, Cruas 1-2, Dampierre 1-2, Gravelines 1-2, Tricastin 1-2 (toutes dont l’arrêt est prévu pour 2029-2035). Dans les années à venir, devra-t-on s’attendre à voir de plus en plus, à côté des poubelles nucléaires, des cimetières de vieux réacteurs abandonnés et fortement imbibés de radioactivité ?

Tout ça, c’est le serpent énergétique et capitaliste qui se mord la queue : grâce à l’enfouissement des déchets nucléaires à 500 mètres sous terre à Bure, une solution toute faite et dangereuse est trouvée pour les déchets nucléaires produits dans les décennies passées et dans celles à venir. Sans plus aucun problème de gestionnaire quant à l’enfouissement, et tandis que les réacteurs arrivent en fin de vie, rien ne semble à présent faire obstacle au nucléaire et à la construction de nouvelles centrales.

> Des raisons de s’opposer à la poursuite du nucléaire

Soutenu par les gouvernements successifs, le nucléaire n’a jamais été remis en cause par l’État depuis le lancement du Plan Messmer en 1973. Après l’exploitation de quelques centrales parsemées sur le territoire français, et au nom de la « croissance » et du « progrès » économiques, ce plan met au point la stratégie électronucléaire massive en prévoyant la construction de 4 à 6 réacteurs par an jusqu’en 1985. EDF, maître d’œuvre, envisage dans le même temps d’équiper environ trois millions d’habitats en chauffage électrique d’ici la même année.

Malgré la pression de l’État, il y eut, de la fin des années 1970 au milieu des années 1980, d’importants mouvements contre la construction de centrales à Creys-Malville, en Bretagne (le Carnet, le Pellerin, Plogoff,..), à Golfech ou encore à Chooz. Le mouvement, qui était très vif pendant ces années, a été progressivement affaibli, à la fois par la répression policière, et par la récupération d’une partie de l’opposition au profit d’un écologisme d’État (les Verts) et d’un lobbyisme pro-énergies « vertes ».

Depuis ce passage en force, et bien que les luttes antinucléaires ne se sont jamais réellement arrêtées [8], le nucléaire semble comme chez lui en France. Installé de si longue date et à si haute densité, il pourrait presque passer, en particulier auprès des jeunes générations, pour « naturel », du moins aussi naturel que les églises de village. C’est cette possible naturalisation qu’il s’agit de battre en brèche, en balayant les divers aspects de l’exploitation électronucléaire française.

Tout d’abord, les nucléocrates, à coup de propagande nationaliste et progressiste, nous ont appris à nous accommoder du nucléaire et du « risque nucléaire », comme s’il ne pouvait en être autrement. Et ce, en dépit des nombreux « incidents » survenus, démontrant le caractère intrinsèquement incontrôlable de cette industrie. Ainsi, après Tchernobyl, les personnes souhaitant une évacuation de la zone contaminée, ont été rappelées à l’ordre, sommées de rester par les nucléocrates, qui, par soucis de faire des économies, les fustigea d’être « radiophobes », c’est-à-dire en proies à la « peur de la radioactivité dénuée de tout fondement ».

Et c’est près de dix ans après Fukushima, et après avoir « prouvé » une nouvelle fois qu’il est possible de « vivre » en territoire nucléarisé, que le nucléaire se présente aujourd’hui comme abracadabra !… la solution face au réchauffement climatique !

Or, nous n’oublions pas que le nucléaire civil est intrinsèquement lié au nucléaire militaire. En effet, L’option du nucléaire « civil » permet de rentabiliser la recherche militaire, dont il est un sous-produit. Il accroît ainsi la militarisation de l’économie, tant dans la finalité que dans son organisation (surveillance des centrales, des convois, des usines de retraitement, répression sur les antinucléaires comme à Bure). La société nucléaire ne peut qu’être policière, hyper-centralisée et technocratique. La politique de dissuasion (chantage à la destruction) accroît la dépendance de nombreux pays ne détenant pas l’arme atomique, vis-à-vis des puissances nucléaires. Rappelons-nous les essais nucléaires réalisés par la France en Algérie de 1959 à 1966, en Polynésie de 1966 à 1996, l’envoi de munitions d’uranium lancées par l’OTAN comme projectiles en ex-Yougoslavie en 1999, ou encore des obus flèches à uranium appauvri envoyés par l’armée française au Mali en 2013. En parallèle, le choix de la stratégie nucléaire entraîne une série de fabrications sophistiquées (mirages, radars, sous-marins, missiles,..) qui amènent des surprofits pour quelques capitalistes (Dassault, Airbus, Safran, Thalès,..) aidés par le ministère de la Défense. Il est donc important d’analyser la politique d’exportation des centrales, comme un prolongement de la politique de ventes d’armes. Encore dernièrement, comme les autres États détenant l’arme atomique, la France n’a pas ratifié le Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires (TIAN) porté par l’ONU (impliquant destruction des stocks et engagement à rester exempts d’armes nucléaires), face à 122 États ayant voté en faveur de l’adoption du TIAN et à 37 États préparant leur procédure de ratification. L’interdépendance du civil et du militaire est totale : l’électro-fascisme est en marche quand on ne sait plus dire où s’arrête le domaine civil et où commence le domaine militaire.

Outre son usage militaire et la militarisation qu’elle implique, la mise en œuvre de l’industrie nucléaire a été pour l’État une excellente occasion d’amplifier son contrôle sur la population française, car elle lui fournissait de parfaits prétextes : l’argument de la complexité de l’industrie nucléaire qui a permis de laisser le domaine du nucléaire à l’État et ses « experts » ; les impératifs de sécurité qui ont servi de prétexte à l’État pour maintenir le secret sur un grand nombre de ses activités ; enfin, le nucléaire a placé les individus dans une situation de plus grande dépendance par rapport à l’État : celui-ci se présentant comme la seule force ayant le pouvoir d’assurer leur sécurité, sans discuter la moindre des décisions.

De plus, le nucléaire assouvit l’impérialisme et le pouvoir colonial de la France sur les populations qui fournissent l’uranium (Niger, Kazakhstan,..). Or, on le voit bien, l’« indépendance énergétique française » est un leurre car les ressources fossiles ne se trouvent plus en France. Pour des raisons de compétitivité, les mines d’uranium françaises ont fermé dans les décennies passées car exploiter des mines dans d’autres pays permet de réduire les coûts de main d’œuvre et permet également aux nucléocrates de délocaliser la pollution. Cette ingérence a des conséquences sociales dans les autres pays, comme on peut le voir aujourd’hui avec la fermeture des mines d’Arlit [9] au Niger, et la possible augmentation du coût de l’uranium au Kazakstan, premier producteur mondial, suite aux révoltes actuelles (liées à l’augmentation du prix du gaz).

Si le nucléaire a toujours été imposé aux populations, malgré leurs protestations, c’est qu’elles en connaissent les risques. En effet, tout le processus du nucléaire représente des dangers conséquents (radioactivité, pollution des eaux, risques de fuites, risques d’explosions, cancers de la thyroïde, prolifération de l’arme nucléaire,..) de l’extraction de l’uranium, aux centrales, aux transports et au stockage des déchets. Concernant la pollution des eaux, on peut prendre l’exemple de Chooz en 1968 où un « incident » a exigé deux années de réparation : la panne a été gardée secrète et des eaux radioactives ayant servi à noyer le réacteur ont été rejetées dans la Meuse.

À court terme le nucléaire représente un danger important pour toutes les travailleur·euses de l’industrie nucléaire ; à moyen terme pour tou·tes celleux qui « vivent » près des centrales, des mines, des usines, des poubelles nucléaires, dans les zones contaminées (essais atomiques, « accidents »,..) et pour nous tou·tes à long terme par la destruction des écosystèmes.

> Pour conclure

Dans ce contexte de grande bouffonnerie présidentielle, et après avoir matraqué de propagande « verte » que le nucléaire serait la solution au réchauffement climatique, le terrain médiatique semble préparé pour la nucléarisation intensive des années à venir, quel que soit la.e candidat·e élu·e. Avec l’aval de la Commission européenne, qui contribuera à coups de financements publics, cette poursuite du nucléaire rêvée par les dirigeants français va accélérer la numérisation de la société et l’autoritarisme qui va avec, tout en permettant l’exportation du nucléaire à l’étranger (qu’il s’agisse de réacteurs, de missiles ou de sous-marins).

Malgré tout la propagande mise en place, nous ne sommes pas dupes sur les objectifs d’une telle politique : gaver le Capital et les nucléocrates, assouvir la soif de pouvoir et les délires mégalomaniaques d’une poignées de technocrates.

Nous nous opposons à l’expansion énergétique, de l’hégémonie nucléaire aux centrales éoliennes et autres arnaques estampillées « renouvelables ». Nous refusons votre « progrès » soit disant inéluctable et synonyme de mort pour celleux qui en subissent les conséquences. Gardez vos pots cassés et les fleurs putrides qui y poussent, nous n’en avons pas besoin.

Cette voie, celle du profit, de l’autoritarisme et d’un futur techno-fasciste, n’est pas la nôtre. C’est pourquoi nous continuerons coûte que coûte à nous y opposer, invitant avec nous tou·tes les individuEs conscient·es de l’urgence de lutter contre la poursuite de l’idéologie destructrice des dirigeants. À bas l’État et sa société nucléaire !

Des individuEs contre le progrès de la soumission
contact : nucleaire-esbroufe@riseup.net

Pour aller plus loin :

– Article reporterre.net/Nucleaire-Macron-lance-la-construction-de-nouveaux-reacteurs (nov. 21)

– Brochure Votre écologie est un désastre : déconnectons-la (la Chose, 2020)

– Livre Histoire lacunaire de l’opposition à l’énergie nucléaire en France (Association contre le Nucléaire et son monde, 2007, 220 p.)

– Tract Court-circuit, Comité lillois de soutien aux luttes anti-nucléaires (1980)

– Site internet de la lutte contre CIGEObureburebure.info

– BrochureLa java atomique : quelques pistes de réflexion autour du démantèlement et de la relance du nucléaire(anonymes, 2011)

– Brochure Le vent nous porte sur le système : ou comment être anti-nucléaire sans devenir pro-éolien (collectif libertaire anti-nucléaire amiénois, 2009)

– Film La colère dans le vent (Amina Weira, 2016, 54 min) : témoignages d’anciens mineurs ayant travaillé dans la mine d’Arlit au Niger

– Film Pas res nos arresta (collectif de l’Amassada, 2016, 64 min) sur la lutte contre le méga transformateur de Saint Victor, ses 1000 éoliennes industrielles et le monde qui l’accompagne

– Articles Non, la voiture électrique n’est pas écologique ;La voiture électrique cause une énorme pollution minière ; Derrière la voiture électrique l’empire des Gafam (Reporterre, 2020)

– Livre Merci de changer de métier – lettre aux humains qui robotisent le monde (Célia Izoard, 2020, 135 p.)

– Livre (en ligne) Première partie de Data Feminism traitant des rapports de pouvoir et, entre autres, de leur répercussions/instrumentalisation sur et via les algorithmes (en anglais) : data-feminism.mitpress.mit.edu/pub/vi8obxh7/release/3#data-science-by-whom

Notes

[2Qui un jour deviendront peut-être la norme, si ce n’est obligatoire, comme c’est devenu le cas de la voiture et du téléphone.

[3Réacteur de troisième génération

[5En fait, les pays producteurs de nucléaire se sont alliés avec les pays producteurs de gaz (principalement dans l’Europe de l’Est), afin de faire passer à la fois le nucléaire et le gaz pour des énergies « vertes ».

[6Plus d’informations sur CIGEO dans l’enquête dessinée Cent mille ans : Bure ou le scandale enfoui des déchets nucléaires (Pierre Bonneau, Gaspard d’Allens, Cécile Guillard) ; et dans la brochure Histoire et contexte de la lutte de Bure

[8On peut citer les luttes contre les trains transportant combustibles ou déchets, les contestations contre la construction de l’EPR à Flamanville (depuis 2005), contre les lignes THT (Haute-Durance en 2014-17, Normandie 2011-12), et contre l’enfouissement des déchets nucléaires (dans plusieurs sites en France, depuis les années 1980 ; puis depuis 2000 à Bure où un « laboratoire de recherche » s’est imposé). Les contestations nucléaires ont également ressurgis après Tchernobyl et Fukushima.

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