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Pour une Maison des Peuples à Neyrpic

Nous transmettons par le CRIC une lettre ouverte écrite par les personnes ayant occupé le temps d’une soirée un hangar abandonné dans le quartier Neyrpic à Saint Martin d’Hères avant de s’en faire déloger par les forces de l’ordre.
L’idée était d’en faire un lieu populaire et collectif d’organisation et d’activité, entre Gilets Jaunes, groupes écolos et personnes autonome. Nous avons simplement transformé la notion de "maison du peuple" en "maison des peuples" dans cet appel comme cela a été fait à Bagnolet le même week-end.
Il est à destination de la mairie "communiste" de Saint Martin d’Hères qui expulse par la force les tentatives de communisme.

POUR UNE MAISON DES PEUPLES À NEYRPIC
Monsieur le Maire de Saint-Martin-d’Hères,

À l’occasion du premier anniversaire de notre mouvement et en réponse à l’appel au blocage d’un lieu symbolique de la consommation par la quatrième Assemblée des Assemblées (ADA) de Montpellier, nous, Gilets Jaunes de Grenoble, soutenus par d’autres collectifs (Alternatiba/Anv COP 21, Extinction Rebellion, Fridays For Future et Neyrpic Autrement), avons décidé d’occuper un hangar du site Neyrpic pour y faire naître une Maison des Peuples.

L’ouverture de Maisons des Peuples correspond à notre volonté de créer des lieux accueillants pour tous les citoyen.ne.s qui veulent construire une autre société, loin des jeux de pouvoir des partis politiques. Ayant été expulsé.e.s de manière illégale par la police, sans notification du tribunal samedi soir, nous n’avons pas eu le temps d’échanger avec vous. Nous souhaitons donc, à travers cette lettre, réaffirmer notre opposition au projet Neyrpic tel qu’il est conçu aujourd’hui, mais également vous demander la mise à disposition du hangar afin de reprendre la construction de cette Maison des Peuples là où elle s’est arrêtée.

« Est-ce bien cette société que nous voulons ? », interrogiez-vous la semaine dernière dans le Dauphiné Libéré, à propos de l’extension des horaires d’ouverture sans personnel de caisse au Géant Casino de Saint-Martin-d’Hères. Nous souhaiterions vous poser la même question à propos de votre projet de « pôle de vie, de loisir et de commerces » pour la friche industrielle Neyrpic.

La brochure du promoteur Apsys nous promet une « expérience shopping augmentée », un « concept mixte mêlant shopping, lifestyle, food, sports et loisirs sur 50 000 m² », une « collection de grandes marques inédites », neuf moyennes surfaces, quatre-vingt-six boutiques, une vingtaine de restaurants, ou encore des « loisirs indoor spectaculaires ». Il nous semble que ce que vous appelez un « pôle de vie » n’est rien d’autre qu’un centre commercial 2.0 destiné aux personnes les plus aisées, où les marchandises sont non seulement les objets dans les vitrines, mais aussi les activités sportives, les différentes formes de divertissement et même les bons moments en famille ou entre amis. Bref, un lieu pour enfermer toujours plus de dimensions de nos existences dans les logiques du profit.

Aujourd’hui, vous ne pouvez plus nier la triple impasse à la fois écologique, sociale et démocratique dans laquelle nous nous trouvons collectivement. Il nous est impératif de restructurer nos façons de nous organiser, d’échanger, de subvenir à nos besoins et, plus profondément, il nous faut renouveler nos manières d’être au monde. Or, c’est précisément ce que le projet Neypric ne fait pas. C’est un projet de l’ancien monde, reproduisant les mêmes logiques productivistes et consuméristes qui sont la cause des problèmes actuels. Il recouvre par de la consommation divertissante toute perspective de réinvention de la vie politique locale. Ce projet propose un « pôle de vie » pour des client.e.s, nous voulons un cœur de ville pour les citoyen.ne.s.

Abandonner un espace si central aux mains des grands groupes privés afin que le territoire gagne en « attractivité » au sein de l’agglomération, est-ce là votre projet ? Cela ne nous semble pas en valoir la peine : chercher à gagner au grand jeu de la compétition entre les territoires implique de s’avouer vaincu sur le plan culturel, puisqu’on place au cœur de la vie collective le magasin et ses marchandises. Que vous vouliez mailler le territoire et créer une connexion avec le campus universitaire, c’est une bonne chose, mais rien n’oblige à le faire à travers les formes emblématiques du capitalisme. Cessons de soumettre la vie sociale aux exigences d’une économie qui nous fait du mal et qui nous emmène dans le mur.

Au delà du pouvoir d’achat se trouve le pouvoir de vivre ! Si nous devons bien sûr subvenir à nos besoins, nous manquons aujourd’hui cruellement d’espaces de vie politique. L’attachement des Gilets Jaunes aux rond-points en est un indicateur fort. Notre colère devant le projet Neyrpic est fondée et légitime. Elle dit fermement « non » au capitalisme, à ses logiques, à sa culture omniprésente et oppressive. Elle dit « oui » aux alternatives qui valorisent notre humanité, notre créativité, nos capacités à partager et à faire ensemble.

En région parisienne, un projet qui a des similitudes avec Neyrpic, nommé Europacity, vient d’être stoppé par le gouvernement. La ministre de la transition écologique et solidaire, Élisabeth Borne, a considéré que le projet n’était « pas la bonne réponse aux défis du territoire » et qu’il n’était « pas cohérent avec l’ambition que nous portons en matière de transition écologique ». Comme quoi, il n’est pas trop tard pour bifurquer vers une réhabilitation qui fasse passer l’humain d’abord.

Ceci étant posé, nous avons une requête :

Ce week-end, comme à Paris, comme à Montpellier en avril, comme à Caen et à St Nazaire en mai dernier, comme à Marseille et à Toulouse en juin, comme à Nantes et à Bordeaux en octobre, nous avons ouvert notre Maison des Peuples : un lieu ouvert à tous pour se retrouver, échanger, fraterniser.
Un lieu pour s’informer, réfléchir, résister. Un lieu pour construire ensemble, se transmettre des savoir-faire, pour inventer de nouveaux modèles économiques et sociétaux, de nouvelles façons de vivre, à l’abri des violences et des oppressions. Un lieu qui fasse vivre ces valeurs pour lesquelles nous nous battons, et pour lesquelles vous vous battez aussi.

Nous occupions discrètement un hangar de la friche depuis le mercredi 13 novembre au soir. Nous l’avions aménagé en un lieu d’accueil chaleureux, convivial et humain. Il s’apprêtait à accueillir ateliers, assemblées et débats. Tout ceci sans aucune dégradation ni nuisance, le lieu a d’ailleurs été embelli. Comme des recours juridiques empêchent le projet actuel de se concrétiser, nous espérions avoir l’indulgence des autorités pour faire vivre ce lieu. Malheureusement, le samedi soir, une trentaine de policiers cagoulés et leurs chiens nous ont vivement délogé, sans aucune décision de justice.

Aujourd’hui nous apprenons que l’entrée du hangar est sur le point d’être murée. Ce qui signifie que le lieu va rester vide et mort pendant encore de nombreux mois. Nous vous demandons de mettre ce hangar à disposition pour notre maison des peuples, au moins tant que les recours juridiques ne seront pas réglés.

Nous sommes à votre disposition pour en parler plus en détails.

des Gilets Jaunes de Grenoble
avec Alternatiba / Anv Cop 21,
Fridays for Future Grenoble,
Neyrpic Autrement,
Extinction Rebellion Isère

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