Qui sont nos mort·e·s ; sinon celles et ceux ayant vécu hier, sinon notre mémoire ?
S’ils appartiennent au passé, ils n’en n’ont pas moins fondé notre histoire autant personnelle que collective. Et même nos histoires. Celles dont il faut parfois aller puiser la source afin de bâtir un présent conscient des expériences passées. Pour construire des mondes dans lesquels la vie nous semble digne d’être vécue, il nous apparaît alors essentiel d’apprendre à entretenir nos mémoires populaires. Trouver des moyens de les rendre vivantes, de se les conter ; de s’en partager le personnel, mais aussi d’en extraire le commun et le politique.
Si nous ne le faisons pas, d’autres le feront pour nous. Et d’ailleurs, le font déjà, à travers l’Histoire avec un grand H, ses "grands hommes", ses guerres de conquête et de colonisation. Peu de place pour les communard·e·s, les paysan·ne·s exproprié·e·s ou ces femmes qui lancèrent la révolution Russe : celles et ceux qui ont lutté pour un monde meilleur, qui ont tissé chaque fil nécessaire au grand maillage qu’est la vie, n’y apparaissent pas. Pourtant, ce sont nos ancêtres, nous léguant leurs histoires et nos vies imbriquées dans les leurs.
Ce sont aussi pour certain·e·s nos ami·e·s, parents, partis trop tôt et parfois injustement.
Il est alors d’autant plus important d’apprendre à traverser ces épreuves ensemble. Apprendre de nos mort·e·s, leurs parcours, qui elles et ils étaient et comment nous nous inscrivons dans leurs lignées. Autrement, comment pourrions nous comprendre nos trajectoires et la construction de nos identités respectives ? Comment pourrions nous comprendre les maladies de l’humanité ou les désirs de calme social de certain·e·s pendant que d’autres aspirent à de profondes transformations politiques ? Dès lors, il devient nécessaire d’ouvrir des espaces et des temps pour se rencontrer dans la profondeur de ce que nous traversons, et ainsi permettre de se reconnecter fort·e·s de nos expériences, de nos liens et du pouvoir que nous reprenons sur nos vies.
Voilà pourquoi au 38, depuis maintenant 5 ans, l’une d’entre nous, originaire du Mexique, nous initie à la célébration traditionnelle de "los dias de los muertos". Cela nous ouvre la porte sur l’art de célébrer les morts dans la culture Mexicaine, mais aussi sur celui du rituel en général et du culte des défunt·e·s. Cela interroge nécessairement nos façons d’aborder la mort, ici, là où nous vivons. Ce que cette transmission nous apporte est en permanente évolution, et vient questionner notre rapport aux croyances et nos façons de se les partager. Et puis, cette fête permet de traverser les épreuves que sont les mort·e·s avec soin, non pas isolé·e·s face à elles mais bel et bien ensemble.
L’an dernier, invoquant des questions de sécurité du bâtiment, la police s’était introduite dans les lieux en plein milieu de la soirée. Interrompant nos rituels et nos commémorations, salissant nos défunt·e·s. Nous dérobant, une fois encore, les histoires que nous nous racontons. Alors que construire nos luttes et leur mémoire collective passe par visibiliser la manière dont elles sont piétinées par les puissants, cet épisode constitue un point marquant pour la petite histoire de notre centre social. Et nous donne encore plus de foi pour persévérer, les entretenir, et même les développer.
Pour répondre à la complexité de ce que tout cela soulève, des ateliers nous permettront donc autant de comprendre à quoi correspondent les éléments de la célébration traditionnelle des "Jours des morts" au Mexique que d’aborder les questionnements existentiels, spirituels et politiques qui se présentent à nous ici et maintenant. Fête, délices, ateliers créatifs et ludiques sont également au rdv !
FETE DES MORTS 2019
PROGRAMME : Présentation des ateliers
Prix libre
JEUDI 14 novembre
17h30 Acceuil
18h Cérémonie d’ouverture
Afin de contextualiser et d’honorer la tradition d’où est issue la Fete des morts du 38, l’une d’entre originaire du Mexique nous racontera comment elle a vecu cette fête là bas, ce qu’elle lui semble représenter culturellement et socialement, et pourquoi elle nous la fait partager ici au 38, depuis maintenant 5 ans. D’autres organisateur.ice.s non mexicain.ne.s évoquerons également le sens qu’ils/elles voient et souhaitent donner à cette célébration.
19h Quesadillas
Tortillas en forme de croissant de lune, garnies de légumes.
20h Projection Le septième sceau
Ingmar Bergman, 1957 (1h 36min)
De retour des croisades, un chevalier rencontre la Mort en chemin.
Il lui propose une partie d’échecs afin de retarder l’échéance fatidique et trouver des réponses à ses questionnements sur la foi. Entretemps, le chevalier et son écuyer vont faire la rencontre de plusieurs personnages intrigants, entre une famille de troubadours et une horde de dévots fanatiques…
VENDREDI 15 novembre
14h à 18h Atelier cuisine mexicaine
Preparation collective
Ce repas sera servis pour la soirée de samedi.
15h à 17h Discussion De quelle façon commémorons-nous les morts dans notre/nos cultures d’origine.s ?
Sur notre territoire, pouvons-nous nous inspirer de la tradition mexicaine (et d’autres) pour (re)développer nos propres rituels avec autonomie ? Comment ?
Dans ce cas, que devons nous à ces cultures et à leurs peuples ?
15h à 17h Atelier peinture murale
18h à 20h Apéro/ Lecture collective et débat à partir du « Culte de la Charogne » (1907), un texte très irrévérencieux et sans demi-mesure de l’anarchiste Albert Libertad qui critique l’emprise omniprésente des mort.e.s sur la société des vivant.e.s.
La discussion pourra se poursuivre à partir de textes divers et variés sur le thème de la mort proposés et apportés par qui le souhaite.
SAMEDI 16 novembre
15h à 18h Ateliers ludiques et créatifs
Jeux en bois, fabrication de fleurs en papier et calaveras pour l’Autel, maquillages pour petits et grands.
14h à 15h30 Café - Discussion Quelles sont nos croyances ?
De quelle façon résonne en nous le culte mexicain des défunts ? Quels sont questionnements et nos croyances en matière de sacré et de rituel ? Quels sont nos questionnement et nos croyances concernant la mort ?
16h Création de l’Autel des défunt.e.s
A partir de décorations et offrandes qui auront été préparés ou que chacun.e aura apporté nous pourrons amménager collectivement l’Autel et l’espace.
Les éléments du rituel traditionnel mexicain nous serons présenté.
Que gardons nous de nos proches défunt.e.s alors que le temps passe ? Qu’on- ils été pour nous, que nous ont-il transmis ?
C’est aujourd’hui l’occasion d’entretenir leur mémoire, d’entendre les recits d’autres qui traversent cette situation et peut-etre trouver d’autres pistes pour aborder le deuil.
18h Commémoration de nos défunts
Si on y vois du sens c’est aujourd’hui l’occasion d’amener des photos et objets de celles et ceux qui nous étaient chers afin qu’ils prennent place sur l’Autel. Peut être aussi de conter qui ils ou elles étaient pour nous, certaines choses qu’iels nous ont transmis..
Ce moment débutera dans la salle principale, un espace cosy sera mise a disposition pour celles et ceux qui préfèrent un cadre intimiste.
Par ailleurs de trop nombreuses morts sont politiques et injustes nous ne n’oublions pas. Un hommage sera rendu a celles et ceux qui meurent parce qu’ils/elles fuient avec trop d’obstacles des conditions de vie dangereuses, parce qu’iels ne sont pas blanc.he.s, parce qu’iels sont hors- normes, parce que ce sont des femmes, parce que ce monde ne leurs semblais pas assez accueillant ou encore parce qu’iels luttaient pour de dignes conditions de vie.
19h30 Chants
20h Repas mexicain en musique
Dégustation du repas préparé la veille lors de l’atelier cuisine.
Ce thème de la mort pouvant nous brasser, un comité d’ecoute/soutien sera présent en cas de besoin vendredi et samedi, repérable par des brassards orange.
Un espace calme (chill-out) sera installé.
Afin de prendre soin de chacun.e et de l’ambiance nous somme tous.tes invité a une démarche d’ouverture et d’écoute, plus que de jugements hâtifs.
Par ailleurs le racisme, sexisme et autres oppressions ne sont pas bienvenues ici. Si une personne ou situation devenait gênante, il sera possible de trouver écoute et soutiens auprès de l’accueil.
Belle fête des morts a tout.e.s !
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