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Brisons les frontières ! A bas Frontex !

Qu’est-ce que Frontex ?

Créée en 2004, l’agence européenne pour la coopération opérationnelle aux frontières extérieures de l’Europe, appelée Frontex, est le bras armé de la politique (anti)migratoire européenne.

Cette organisation paramilitaire traque, fiche et réprime les personnes exilées qui tentent de franchir les frontières extérieures de l’UE. Son siège est à Varsovie et son président actuel est français. Cette agence fonctionne grâce aux subventions de l’Union européenne et des États membres. C’est l’agence de l’UE la plus financée avec un budget en constante augmentation (281 millions d’euros en 2017).

Suite à une réforme en 2016, Frontex est devenue un corps européen de gardes cotes et de gardes frontières (EBCG), composé de 1000 gardes frontières et 1500 réservistes, dotée d’une autonomie, de moyens financiers matériels et humains plus importants.

Des missions clairement répressives

« L’agence coordonne la gestion des frontières extérieures des Etats membres, les assiste pour la formation des gardes-frontières nationaux, effectue des analyses de risques et organise des opérations conjointes de retour des migrants dans leurs pays d’origine » (source : site web de Frontex).

Liste non exhaustive :
- Interception des bateaux lors des tentatives de passages de mer et refoulement des personnes
- Interventions militaires : déployables très rapidement comme les opérations RABBIT, elles sont de plus en plus justifiées par la "lutte contre le terrorisme" et alimentent les amalgammes racistes assimilant migrations et terrorisme.
- Analyse des risques : centralisation des informations de surveillance et de fichage pour réduire les "risques" de passages et augmenter ceux pris par les exilé.e.s.
- Organisation de "retours conjoints" : expulsions collectives coordonnées par Frontex dans le cadre desquelles ont été rapportés de nombreux actes de violences (coups, insultes, humiliation).

Contrairement à ce qui est parfois affirmé dans les médias, le sauvetage ne fais pas partie des missions de Frontex, et quand il le fait c’est par obligation du droit international. La majorité des sauvetages sont en réalité effectués par des ONG, la marine marchande ou des pêcheurs (souvent accusés de complicité d’ immigration illégale)

Lien avec l’industrie de l’armement et les politiques sécuritaires.

Les frontières sont un lieu d’expérimentation et de développement des technologies de pointe. Frontex est un laboratoire des technologies sécuritaires et militaires. L’Europe finance à travers elle avec de l’argent public l’industrie de l’armement via des sociétés privées telles que Thalès, EADS, Finmeccanica, Lockheed Martin, Aerovision....

Frontex dispose d’un arsenal militaire répressif et d’un outillage sécuritaire de haute technologie : 21 avions, 27 hélicoptères, 116 navires, détecteurs de visions nocturnes mobiles, outils aériens, voitures de patrouille, détecteurs de battement cardiaques et très prochainement des drones et ballons captifs télé-pilotés équipés pour la surveillance aérienne de longue durée des zones maritimes. L’appel d’offre de ces derniers équipements a été attribué à une société israelienne.

Frontex co-responsable des mort.e.s aux frontières

Alors que les institutions s’enorgueillissent de la diminution du nombre de passages et de morts,
elles ne précisent pas que les traversées sont devenues beaucoup plus périlleuses et coûteuses.
Elles sont statistiquement environ cinq fois plus mortelles entre 2015 et 2017. Ceci est une conséquence directe de la militarisation des frontières. En 2016 rappelons que 5148 personnes sont
mortes en tentant la traversée de la méditerranée, sans compter les personnes disparues, blessées, traumatisées.

Pour celleux qui n’auront pas eu les moyens financiers ou physiques de passer du fait de l’augmentation des risques , ils et elles resteront coincé.e.s dans des "zones tampons". De très nombreux témoignages rapportent des conditions de vie atroces pour celles et ceux qui restent bloqué.e.s dans des pays tels que la Lybie (viols, tortures, maltraitances, enfermement,esclavage...). Certain.e.s sont maintenu.e.s dans des camps de rétentions insalubres, sans limite de durée et sans assistance juridique.

Une agence en roue libre en dehors de tout contrôle démocratique.

Frontex ne semble pas donner priorité à la circulation de l’information et à sa transparence puisque aucun de ses rapports n’a été publié. De plus, Frontex peut signer des accords avec des pays tiers (hors UE) ou des organisations internationales sans l’aval des instances européennes. L’agence peut intervenir militairement dans un pays membre de l’U.E et dans ses eaux territoriales sans l’accord de celui-ci. Elle détermine de manière arbitraire le niveau de sûreté d’un port pour y refouler des exilé.e.s intercepté.e.s en mer. Elle piétine totalement le droit d’asile et refoule des migrant.e.s dans leurs pays d’origine sans toujours vérifier si ces derniers peuvent, ou non, demander l’ asile. Le refoulement est illégal au regard du droit internationnal. Ces reconduites illégales conduisent a des scénarios dramatiques pour les personnes directement concernées (torture, exécutions, rançons, traque familiale, etc...).

Si l’agence porte atteinte aux droits fondamentaux, il est difficile de l’en rendre responsable : les mécanismes de plaintes en cas de violations des droits sont inexistants et les responsabilités sont difficilement imputables à l’agent, l’employeur ou le pays dans lequel l’opération a lieu. En tous cas, malgré la fuite d’un rapport confidentiel de l’agence attestant de tirs à balles réelles sur des exilé.e.s, celle-ci n’a jamais été inquiétée...

Alors que Frontex prétend lutter contre les réseaux de passeurs, en réalité, elle ne fait qu’en permettre son développement. Ses obsessions de surveillance des mers et de refoulement ne font que déplacer les passages des migrant.e.s. Les traversées deviennent plus périlleuses et le recours à un/des passeurs devient chaque fois plus nécessaire. Les plus démunis en paient en premier le coût.

L’UGA déroule le tapis rouge à Frontex et ses sbires

Jeudi 22 mars et vendredi 23 mars, le Centre d’Etudes sur la Sécurité Internationale (CESICE) et le Centre de Recherche Juridique (CRJ) organisent à l’UGA un colloque intitulé "De Frontex à Frontex. Vers l’émergence d’un service européen de garde-côtes". Le texte de présentation du colloque explique que Frontex est une "première étape potentielle vers la création d’une véritable administration européenne des migrations et de l’asile censée permettre à l’UE de montrer aux citoyens européens qu’elle a les moyens de ses ambitions face à la "crise des migrants".

Nous pensons qu’il n’y pas de "crise des migrants"mais une crise des institutions et de l’accueil des personnes exilées. La "crise des migrants" est une construction politique et médiatique qui cherche à diffuser l’idée d’un envahissement de l’Europe pour justifier des politiques impérialistes et racistes de ségrégation des exilé.e.s. n’hésitant pas à manipuler les chiffres de l’immigration (notamment par Frontex en 2015). Rappelons ici que la totalité des demandes d’asile déposées dans l’UE ces dix dernières années représente moins de 1% de sa population et que 75% des migrations dans le monde se font entre les pays dits "des Suds". Cet usage médiatique et politique des chiffres, cherche à justifier les mesures répressives en présentant les exilé.e.s soit comme des personnes dangereuses soit comme des victimes des passeurs, mais jamais comme des exilée.e.s fuyant les conséquences de l’impérialisme occidental.

Ce colloque n’a aucune ambition critique. La seule intervenante associative (responsable des questions européennes à La Cimade) parle des "Conséquences pour les ONG". A aucun moment, les personnes exilées, pourtant premières concernées, ne sont invitées à participer au colloque. Les conséquences, pourtant mortelles, des actions de Frontex ne sont questionnées que par le prisme du contrôle judiciaire de l’agence, par quelques universitaires venus de toute la France. Il est encore plus problématique de constater que les intervenants non-académiques sont soit des flics soit des technocrates.

Les organisateur.ice.s du colloque ont invité Michel Quillé, le président d’Euromed Police IV. Cet ancien commissaire de police est reconverti depuis les années 2000 dans le lucratif business de l’expertise en sécurité qui l’a amené à obtenir des responsabilités dans différentes institutions de la sécurité. Aujourd’hui il est le président d’un "projet" financé par l’Union Europénne (2016-2020) et mis en oeuvre par Civipol, un consortium administré par l’Etat français (40%) et des entreprises d’armement. Au delà de ce personnage peu fréquentable, sont également invités des technocrates comme Hervé Yves Caniard, le directeur de l’Unité des Affaires Juridiques de Frontex, ou Matthieu Chavrier, conseiller au Service juridique du Conseil européen et du Conseil de l’Union européenne, responsable des domaines de Schengen et des questions migratoires. Léa Hannaoui-Saulais, ancienne assistante parlementaire de Rachida Dati, est maintenant "Policy officer" au service "Migration and Home Affairs" de la Commission européenne, responsable de la politique de l’UE concernant la migration et les affaires intérieures.

Ces personnages ne sont pas anecdotiques. Ils et elles sont les artisan.ne.s de l’ombre des politiques qui traquent, trient et précarisent les personnes exilées.

Le fait que le colloque se déroule à l’IMAG n’est probabblement pas non plus un hasard.

Ce bâtiment, l’un des plus sécurisé du campus (caméras, portiques à badge...), accueille les activités de différents laboratoires de l’ « Institut d’informatique et mathématiques appliquées » et a notamment pour objectif de "faciliter le transfert des recherches en laboratoire vers l’industrie". Les représentants de Frontex, comme ceux de l’Union Européenne ou d’Euromed Police, ne manqueront pas d’y croiser des spécialistes des nouvelles technologies pour le contrôle des populations.

L’UGA ne fait pas qu’offrir un espace où Frontex et ses partenaires peuvent dérouler leur communication bien huilée et remplir leurs carnets d’adresses. Elle entretient également les causes structurelles du départ des exilé.e.s en signant divers partenariats avec l’industrie militaire ainsi qu’avec des acteurs impliqués dans des activités impérialistes de prédation de ressources dans des zones de conflit (nucléaire, électronique, métaux rares, etc.). Un travail d’enquête serait d’ailleurs à mener sur ce sujet pour recenser cette multitude de partenariats. Par exemple, le laboratoire Verimag de l’INPG (installé à l’IMAG) travaille en collaboration avec les entreprises ayant un lien direct avec la production d’armes, comme EADS, Thalès, SySGO, Airbus Helicopters, MBDA missile systems, Dassault Systems, Safran.

Finalement, l’organisation de ce colloque est révélatrice d’une logique mortifère dans laquelle s’inscrit l’UGA. La future « Université intégrée », que nous promettent les dirigeants de l’UGA, dessine un futur totalitaire où les activités de formation et de recherche ne servent plus à l’élaboration d’une pensée critique sur nos conditions d’existence mais bien à l’approfondissement de notre aliénation industrielle, policière, militaire et politicienne.

Pour aller plus loin :
http://www.migreurop.org/
http://www.frontexit.org/fr/ressources/documents

Pour l’ensemble des raisons évoquées ci-dessus, nous appelons à s’opposer à ce colloque et à se rassembler :

le jeudi 22 mars à 15h devant l’IMAG

Signataires : RUSF, Union départementale CNT 38, CLAGI, CISEM, CIIP, Collectif Hébergement Logement

TRACT Rassemblement contre FRONTEX

jeudi 22 mars 2018

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