Le Conseil constitutionnel vient de rendre sa décision sur la loi « responsabilité pénale et sécurité intérieure ». Ce texte, adopté le 18 novembre 2021 par le Parlement, prévoyait notamment de ré-autoriser les drones policiers. Si les drones avaient été interdits à quatre reprises depuis 2020 (deux fois par le Conseil d’État, une fois par la CNIL et une fois par le Conseil constitutionnel), l’entêtement du gouvernement a porté ses fruits. Après deux années d’illégalité, les drones vont ré-occuper le ciel et restaurer la surveillance de masse.
Cette mauvaise nouvelle ne vient pas seule : le Conseil constitutionnel valide aussi les caméras embarquées sur les véhicules de police (hélicoptères, voitures…) ainsi que la vidéosurveillance des cellules de garde-à-vue. À côté, le Conseil ne prend même pas la peine d’examiner les nombreuses autres dispositions de cette loi qui s’en prennent à d’autres libertés fondamentales (amendes forfaitaires, prise d’empreintes forcée, répression des mineurs isolés, modification du régime d’irresponsabilité pénale
Voir l’analyse commune de la Quadrature du Net avec le SAF, le SM et la LDH
Autorisation des drones
Le Conseil constitutionnel autorise la police et la gendarmerie nationale à utiliser les drones tant pour des fins administratives que pour les enquêtes judiciaires. Par exemple, les caméras sur drones pourront être déployées au cours de manifestations et rassemblements jugés comme « susceptibles d’entraîner des troubles graves à l’ordre public », aux abords de lieux ou bâtiments « particulièrement exposés à des risques de commission de certaines infractions » ou encore dans les transports ou aux frontières.
Le Conseil constitutionnel ne trouve rien à redire sur la disproportion et l’imprécision de ces larges finalités. De même, il valide le fait que ces nouvelles mesures soient simplement autorisées par un préfet (et non un juge) qui estimera seul si ces technologies de surveillance sont nécessaires et proportionnées. En somme, la police autorisera la police à utiliser des drones selon sa propre appréciation de la nécessité de surveiller…
Tout au plus, le Conseil constitutionnel apporte quelques réserves sur la possibilité pour la police d’utiliser ces nouvelles caméras à des fins de reconnaissance faciale, mais ces limites paraissent bien dérisoires par rapport à l’utilisation déjà massivement illégale que la police en fait aujourd’hui.
Seule l’expérimentation de drones par la police municipale est censurée, freinant les fantasmes sécuritaires des maires, sans pour autant qu’une interdiction de principe ne soit clairement formulée. Le Conseil constitutionnel offre au gouvernement la possibilité de revenir avec un nouveau texte corrigeant le tir, comme il l’a fait avec cette nouvelle loi, huit mois après la censure de la loi sécurité globale.
Contrôle a posteriori
Comme on l’a vu, pour la police nationale et la gendarmerie, le Conseil constitutionnel permet aux préfets d’autoriser les drones de surveillance mais, pour la suite, le Conseil se défausse en renvoyant aux juridictions administratives le soin de contrôler au cas par cas et après coup la légalité de ces autorisations. Lorsqu’il sera saisi d’une telle affaire, le juge devra notamment vérifier si les drones étaient bien nécessaires à l’objectif poursuivi (par exemple, ne pouvait-on pas assurer autrement la sécurité d’une manifestation ?) et si le public en a été correctement informé.
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