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Mineur isolés en prison : Comment l’Hérault envoie les keeps decreasing.

While much of the attention is directed to the United States, young migrants are incarcerated in south of France. The criminalization of migration seems to have reached a new step, the use of prison for young people whose authorities continue to violate theirs rights.
And help of these young people keeps decreasing.

Mamadou Barry est un jeune Guinéen, arrivé en France au début de l’année après un périple à travers le Maroc et l’Espagne. Depuis la mi-mars, il avait intégré une classe de troisième dans un collège de Sète (Hérault) où il donnait toute satisfaction. Placé par l’aide sociale à l’enfance, il logeait dans une maison d’enfants à caractère social. C’est là que la police est venue l’arrêter le 15 mai à l’aube.

Depuis, il est incarcéré à la maison d’arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone. Ses documents d’identité indiquent qu’il est né en 2003. Mais les examens dentaires et osseux menés à la demande du parquet lui donnent 19 ans, ce qui a suffi à déclencher une incarcération provisoire. Il est jugé ce mercredi 20 juin pour faux et usage de faux par le tribunal correctionnel de Montpellier. Il risque six mois de prison.

Une trentaine de migrants mineurs non accompagnés – « MNA », selon la rugueuse terminologie administrative –, pour la plupart originaires d’Afrique noire, ont été incarcérés dans l’Hérault depuis la fin 2016, ce qui semble en faire l’un des départements les plus répressifs de France. Selon la Cimade, des peines de prison ont aussi parfois été prononcées contre des jeunes dont la minorité était contestée dans le Rhône (mais elles ont été cassées en appel), les Bouches-du-Rhône, la région parisienne ou le Maine-et-Loire. Mais elles ne sont pas aussi nombreuses et systématiques que dans l’Hérault.

L’histoire se déroule presque toujours de la même manière. Ces migrants se trouvent, soit parce qu’ils arrivent d’eux-mêmes dans l’Hérault, soit parce qu’ils y sont affectés par la mission « mineurs non accompagnés » du ministère de la justice, adressés au service d’aide sociale à l’enfance (ASE) du conseil départemental, qui est légalement obligé d’organiser leur mise à l’abri. Ils sont alors placés dans un hôtel, une famille d’accueil ou une maison d’enfants à caractère social.

Cette étape peut durer plusieurs mois, le temps que l’une des deux associations locales mandatées par le conseil départemental procède à l’évaluation de leur minorité, selon une procédure qui dure cinq jours. Si la minorité est reconnue, un juge pour enfants prononce une ordonnance de placement provisoire donnant la tutelle de l’adolescent à l’ASE qui se charge alors, entre autres, de sa scolarisation.

Ceci correspond à la procédure nationale d’accueil telle qu’elle est prévue par la réglementation en vigueur. Mais dès les premières arrivées importantes de mineurs à l’automne 2016 (à l’échelle nationale, le nombre d’arrivées a été multiplié par six depuis 2013, selon le dernier rapport de la mission « mineurs non accompagnés »), les services de l’ASE de l’Hérault ont pris l’habitude de transmettre quasi systématiquement les documents d’identité produits par les jeunes au service de la fraude documentaire de la police aux frontières (PAF).

Quand ce dernier conclut à un document falsifié, le procureur déclenche une enquête pour faux et usage de faux, qui peut conduire à une expertise médico-légale de l’âge du jeune. Si celle-ci estime que le jeune a plus de 18 ans, les choses vont alors très vite : arrestation, jugement le plus souvent en comparution immédiate (c’est-à-dire avec un avocat commis d’office qui n’a que quelques heures au mieux, souvent quelques dizaines de minutes, pour prendre connaissance du dossier) et condamnation à une période de prison ferme souvent comprise entre un et trois mois si le jeune reconnaît être majeur, et régulièrement de six mois s’il dit être mineur, ainsi qu’à une obligation de quitter le territoire français de trois à cinq ans.

« L’État et le département partent du principe que le jeune fraude. Il n’y a plus aucune présomption d’innocence », dénonce Thierry Lerch, militant de RESF (Réseau éducation sans frontières) dans l’Hérault. Il ajoute qu’« à leur sortie de prison, ces jeunes sont placés en centre de rétention administrative, mais finissent le plus souvent par être relâchés faute de pouvoir organiser leur expulsion. Ils errent alors de squat en squat, ou dans des hébergements provisoires offerts par des militants. Ni majeurs, ni mineurs, ils sont dans un vide juridique. Leur avenir en France, c’est le néant ».

Cette suspicion systématique à l’égard des jeunes migrants ignore tout de la terrible réalité de ce que sont les parcours migratoires. La tenue des états-civils dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne laisse parfois à désirer. Si deux dates ne concordent pas sur deux documents, cela n’est pas nécessairement le signe d’une fraude, mais peut être lié au fait que l’administration du pays d’origine a émis deux documents contradictoires.

Certains jeunes ignorent sincèrement leur âge exact. D’autres déclarent avoir plus de 18 ans après avoir franchi le détroit de Gibraltar et 15 ans après avoir passé les Pyrénées, pour éviter de rester en Espagne (qui les aurait gardés au nom de la protection des mineurs) : cela peut être le cas de mineurs originaires d’Afrique francophone, qui préfèrent vivre dans un pays dont ils parlent la langue.

« Ils sont considérés comme des étrangers et non comme des mineurs et gérés selon la logique répressive de la politique migratoire, et non selon celle, humaniste, de la protection de l’enfance », relève Laure-Agnès Suita, de RESF34. « On voit en eux des coupables et non des victimes », en particulier des réseaux de passeurs qui remettent parfois des passeports frauduleux au moment de tenter le passage en Europe.

La logique de suspicion est aussi clairement à l’œuvre dans le recours aux tests médicaux, reposant sur une radiographie du poignet. Tous les spécialistes, comme l’a constaté le Haut Conseil de la santé publique, s’accordent à penser que cette technique a une marge d’erreur considérable, autour de dix-huit mois. Une estimation de 18 ans signifie donc que le jeune a entre 16 ans et demi et 19 ans et demi.

Si la présomption d’innocence était respectée, les juges devraient par conséquent retenir la valeur la plus basse et conclure à la minorité. Ce n’est presque jamais le cas dans l’Hérault. Le cadre juridique dans lequel ces examens sont conduits est également en dehors de toute légalité. Plusieurs migrants témoignent que le médecin qui les a examinés leur a demandé de montrer leurs parties génitales, ce qui est strictement interdit par la loi.

Outre la présomption d’innocence, plusieurs autres principes juridiques fondamentaux sont bafoués par la traque aux « faux mineurs » menée dans l’Hérault. « Lorsque l’ASE envoie les documents des jeunes au service de la fraude documentaire de la PAF, elle ne délivre souvent aucun récépissé, ce qui prive les jeunes de tout document alors que le droit à justifier de son identité est un droit fondamental », s’indigne l’avocate montpelliéraine Sophie Mazas, qui a défendu plusieurs de ces jeunes.

Autre exemple : « Quand le parquet ouvre une enquête, le jeune passe en garde à vue selon le régime des majeurs, sans aucun respect des droits de la défense, puisque c’est sur la seule foi d’un officier de police judiciaire du service de la fraude documentaire de la PAF. »

Comment expliquer cette triste spécificité du département de l’Hérault ? Les services de l’ASE semblent avoir été pris de court par l’afflux de mineurs non accompagnés. Ils étaient une trentaine pris en charge en 2013 ; au 31 mai 2018, ils étaient 388, auxquels s’ajoutent 116 mis à l’abri en attente d’évaluation de leur minorité et 135 ayant signé des contrats de jeunes majeurs (un dispositif qui permet de poursuivre la prise en charge du jeune après ses 18 ans).

L’administration a réagi à cet afflux avec zèle, en portant plainte, à partir de la fin de 2016, pour escroquerie et en se constituant partie civile avec demande de dommages et intérêts (remboursement des quelque 280 euros par jour des frais de l’ASE durant la période de prise en charge) dans plusieurs affaires.

« Tout cela est fini depuis que j’ai pris mes fonctions, début 2017, de déléguée à l’enfance et à la famille, martèle la conseillère départementale (PCF), Véronique Calueba-Rizzolo. Le département a renoncé à toute poursuite judiciaire. À chacun son travail. Nous nous occupons de la protection de l’enfance, en lien avec les associations. Si le parquet veut engager des poursuites, c’est son affaire. »

Le président du conseil départemental, Kléber Mesquida (PS), s’est engagé par courrier fin mai auprès des associations (Cimade, RESF 34 et Ligue des droits de l’homme), très mobilisées, à mettre fin à tout dépôt de plainte et constitution de partie civile. La promesse semble pour le moins longue à se concrétiser.

Le département est soumis à une très forte pression de l’extrême droite : au second tour des dernières élections départementales, le FN, avec 36,4 % des voix, est arrivé très largement en tête en nombre de suffrages, envoyant pour la première fois six élus au conseil départemental. C’est donc possiblement vers une certaine forme de politisation de la justice, du moins de sa sensibilité au contexte politique local, qu’il faut rechercher la cause de la traque aux « faux mineurs » menée dans l’Hérault.

Une anecdote en dit long à ce sujet. Le 30 juin 2017, les locaux de RAIH (Réseau accueil insertion de l’Hérault), une des deux associations locales de travailleurs sociaux mandatées pour l’évaluation des mineurs non accompagnés, sont saccagés par des militants de la Ligue du Midi, un groupuscule d’extrême droite local, qui se vantent de leurs exploits sur les réseaux sociaux. La présidente de RAIH, Béatrice Hervouet, porte plainte pour dégradation en réunion. Jugement : un mois de prison ferme pour un membre de la bande, déjà condamné à plusieurs reprises, et relaxe pour son dirigeant. Difficile de ne pas remarquer que ces condamnations sont bien plus légères que celles dont sont victimes nombre de jeunes migrants qui n’ont commis aucun acte de délinquance.

L’association RAIH, qui comptait cinq salariés il y a encore un an, va cesser ses activités et fermer les portes de son local d’accueil. En cause, non les violences de la Ligue du Midi mais la suppression des deux tiers des subventions du conseil départemental de l’Hérault ! « Nous n’avons jamais eu la moindre explication écrite, alors que nous travaillons pour le département depuis 2001 et que notre travail a toujours donné satisfaction, souligne Béatrice Hervouet. Lors d’une réunion avec le directeur des services, on nous a laissé entendre que nos évaluations, qui concluent à la minorité de 80 % des jeunes, étaient trop généreuses. »

La communiste Véronique Calueba-Rizzolo, manifestement gênée aux entournures, évoque vaguement « des faiblesses comptables dans la gestion de RAIH 34 » et une « rupture de la confiance réciproque ». En attendant, c’est une association au professionnalisme unanimement reconnu qui a mis la clé sous la porte, rendant encore plus impossible la vie des jeunes migrants dans Montpellier et ses environs.

voir aussi :
l’article de rue 89 datant de 2014 :https://www.rue89lyon.fr/2014/05/20/mineurs-isoles-etrangers-rassemblement-apres-nouvelle-condamnation-de-la-prison/
l’article de la ldh datant de 2015 : https://www.ldh-france.org/mineurs-etrangers-isoles-proscrire-les-tests-dage-osseux/

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